Textes poétiques
Poème inachevé
Placez plus de fleurs dans votre maison
Donnez plus d'amour à vos relations
Mettez plus de cœur dans toutes vos passions
...
J'avais commencé à écrire ce poème lorsque la nouvelle était tombée : à l'est, la guerre s'intensifiait et renaissait de ses cendres presque centenaires. Le vieux monstre belliqueux semblait ridicule mais non moins dangereux pour les générations épargnées, qui replongeaient incrédules dans leurs livres d'histoire.
La journée avait débuté sous un froid soleil qui semblait pourtant vouloir allumer le printemps et non des mèches explosives. Je suis sortie pour m'aérer l'esprit. Sur mon chemin, j'ai croisé en file indienne des chenilles processionnaires du pin qui commençaient leur éphémère défilé. Rien à faire, la guerre restait présente dans mes pensées. Je regardais s'avancer doucement ces nuisibles, visualisant les chars russes qui s'étiraient en une longue chaîne en direction de Kiev. J'allais devoir fournir un gros effort pour ne pas penser à l'actualité durant la journée.
Le lendemain, j'avais repris le même chemin. Les passants, à pied ou à vélo, avaient écrasé la majorité des chenilles. Le massacre formait au sol des tâches grises sur les dalles de béton, dans lesquelles des morceaux de corps de ces thaumetopoea se répandaient. Impossible de ne pas penser aux ukrainiens piétinés par les troupes de Poutine. Actualité urticante qui ramène l'Europe a ses heures les plus sombres.
Décidément, ce début de vingt et unième siècle verra bien des poèmes inachevés, leurs pages déchirées par l'angoisse face à un soulèvement de pancartes muettes, de chansons soixantenaires qui reprennent de la voix et de ferventes prières de popes, rejoints par les cloches de nombreux pays.
Tandis que la menace nucléaire plane, des alliances se nouent. Sanctions économiques, jeux politiques, déplacement des pions sur l'échiquier international... à qui profite le crime ? Les puissants rebattent les cartes de leur sinistre passetemps et redessinent les territoires pendant que le peuple souffre, pleure et meurt. Où sont les monstres ? Qui sont leurs sbires ? La guerre de l'information continue. Qui croire ? Que faire ou ne pas faire ?
Ecrire pour ne rien taire...
Placez plus de fleurs dans votre maison
Donnez plus d'amour à vos relations
Mettez plus de cœur dans toutes vos passions
Et de la bravoure dans toutes vos actions
Dans la nuit glaciale partant combattre
Fleur au fusil, ô jeunesse ennemie
La nuée martiale, l'aube blanchâtre
Char qui rugit et étouffe les cris
Dans des caves sombres, des bébés naissent
Espoirs d'un renouveau, d'amour, de paix
Refoulant l'ombre, ils sont la promesse
De la résurrection et du respect
Trains et cars bondés, familles déchirées
Des milliers d'âmes se retrouvent immigrées
Puis s'organisent les solidarités
Un peu de chaleur et d'humanité
Placez plus de fleurs dans votre maison
Donnez plus d'amour à vos relations
Mettez plus de cœur dans toutes vos passions
Et de la bravoure dans vos décisions